Le
discours de Grenoble : ancrage dans le contexte des « événements
» de lété 2010
Par Marwan Tichani
Il y a maintenant un peu plus dun an, le 16 juillet 2010,
après une course poursuite avec la gendarmerie nationale,
Luigi Duquenet est tué par balle pendant un contrôle
routier à Thésée (Loir-et-Cher). Le gendarme
ayant tiré est à lheure actuelle toujours
placé en mise en examen. Le week-end suivant, la gendarmerie
de Saint Aignan ainsi quune boulangerie, trois voitures,
des feux de signalisations et des arbres sont vandalisés
par une quarantaine de personnes, des gens du voyage proches de
la victime. Le soir du 18 juillet, dautres incidents sont
à noter dans la vallée du Cher, le long du parcours
emprunté par Luigi Duquenet de sa fuite en voiture dans
la nuit entre le vendredi et le samedi. Ces incidents, selon le
maire de Saint Aignan, constituent un règlement de comptes
entre certains voyageurs proche de Luigi Duquenet et la gendarmerie
de Saint Aignan et relèvent donc du droit commun.
Mercredi
21 juillet, le président de la République Nicolas
Sarkozy annonce la tenue dune réunion le mercredi
suivant sur les Roms et les Gens du Voyage, annonçant que
« les événements [
] soulignent les problèmes
que posent les comportements de certains parmi les Roms et les
Gens du Voyage ».
Le
30 juillet, suite à des émeutes dans le quartier
de la Villeneuve à Grenoble le même 16 juillet, le
président de la République Nicolas Sarkozy nomme
Eric Le Douaron, ancien haut fonctionnaire de la police, préfet
de lIsère, et à cette occasion prononce ce
qui restera connu comme le « discours de Grenoble ».
Orientation « sécuritaire », discours «
musclé », selon les commentaires médiatiques
immédiats, le discours de Grenoble semble marquer une accélération
de la politique de sécurité. Nicolas Sarkozy prévient
: « aucune cité, aucune rue, aucune cage d'escalier,
aucune barre d'immeubles ne doit échapper dans ce département
et dans cette ville à l'ordre républicain. ».
La cote de popularité de Nicolas Sarkozy est alors au plus
bas depuis trois ans (sondage TNS Sofres Logica pour Le Figaro
Magazine), et cette insistance sur les politiques sécuritaires
peut être lue comme une tentative de reconquête de
lélectorat de la droite de lUMP voire du FN
(le 14 juillet est signée par 35 députés
UMP la charte du mouvement Droite Populaire qui pose la «
sécurité, première des libertés »
en principe fondateur et insiste sur limmigration «
contrôlée et maîtrisée », et en
juillet dernier Thierry Mariani, un de ses fondateurs déclarait
que la Droite Populaire « se reconnaît, par exemple,
dans
le discours de Grenoble», Atlantico, 29 juillet 2011).
Durant ce discours, le président de la République
sen prend aux « camps » illégaux de Roms,
se défendant pourtant de « stigmatiser les Roms ».
Parlant de « zones de non droit », il sengage
à « procéder d'ici fin septembre au démantèlement
de l'ensemble des camps qui font l'objet d'une décision
de justice » et à engager des démarches lorsque
cette décision na pas été prise
(lire la suite)
Sommaire
:
I. Le discours de Grenoble : ancrage dans le contexte des «
événements » de lété 2010
II. Mouvements de soutien aux Tsiganes et aux Gens du Voyage :
dénonciation dun discours xénophobe et dun
statut juridique hors du droit commun
III. Réaction des institutions internationales: une indignation
partagée face à lobstination des dirigeants
français
IV. Un an après : conséquences de la politique annoncée
à lété 2010 relative aux bidonvilles
de Roms et Gens du voyage
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